#5
LA DÉPRESSION
POST-PARTUM
raconter
JULIETTE
« Maman parfaite évidemment… je m’imaginais maman parfaite. Pour moi quand on allait se voir avec Olivia on allait tout de suite se reconnaître. Et en fait ce n’est pas du tout le cas.
Donc je ne me sens pas maman tout de suite, je ne me sens pas connectée avec ma fille par un amour indéfectible, brutal, puissant, instantané, non.
Je tombe de haut parce que je pensais que ça allait être instantané et ça ne l’est pas du tout. »

DANS CET ÉPISODE
JULIETTE RACONTE LES 2 DÉPRESSIONS POST-PARTUM SUCCESSIVES QU'ELLE A VÉCUES APRÈS LES NAISSANCES DE SES 2 ENFANTS.
Dans un témoignage poignant, Juliette nous explique l’immense déconnexion entre le rôle de mère qu’elle s’était imaginé, et la réalité de sa maternité. Elle nous confie son mal-être croissant, jusqu’à se sentir submergée par une vague d’anxiété et de tristesse qu’elle n’arrive plus à surmonter. Elle nous dit avec franchise les pensées noires qui l’habitent et se transforment peu à peu en pensées suicidaires. Elle nous relate le chemin parcouru, jusqu’au diagnostic de la dépression post-partum : d’abord la honte d’en parler autour de soi, la culpabilité par rapport à ses enfants et son mari, puis l’acceptation de la maladie et le traitement nécessaire par des anti-dépresseurs et des anxiolytiques, en parallèle d’un accompagnement psychologique.
SOUTENIR
les ACCOMPAGNANTS

Nathalie Piquée, Sage femme et Gestalt therapeute formée aux neurosciences sociales et aux neurosciences affectives.
Nathalie est une ancienne sage femme, reconvertie en thérapeute et spécialisée dans les troubles ante et post-natals.
Dans cet épisode, elle nous explique d’abord les symptômes de la dépression post-partum, vécu souvent comme un véritable tsunami : « Il y a quelque chose d’abord qui s’éteint en soi. C’est ce qu’on appelle un gel des affects. Le monde n’a plus de couleur, je ne sens rien ».
Puis, elle insiste sur l’importance d’une prise en charge globale pour accompagner les femmes tout au long de leur parcours.
Une prise en charge coordonnée par une équipe avec :
- Un médecin pour les traitement médicamenteux.
- Un psychologue ou psychiatre pour engager une thérapie suivie.
- L’entourage « pour que cette femme puisse s’accrocher à quelqu’un qui tient et qui tient très fort. »
GÉNÉREUX DONATEURS
Odile – Noémie – Melody – Alejandra – Justine – Jennifer – Damien – Aude – Seyni - Malick - Gilles - Alex - Adrien - Mai-Liën - Maud S. - Xavier – Laurène – Julien – Alexandre - Margaux - Loïc A. – Isabelle - Kévaly - Tiphaine B. - Nicolas - Martial - Guillaume H. - Camille - Annabelle - Philippe L. - Emmanuelle - Laetitia - Aline - Catherine B. - Maud M. - Véronique - Philippe C. - Mathilde L.- Ségolène - Marie - Tiphaine LM. - Benjamin – Hélène - Patrick - Arthur - France - Martin - Thomine - Carole Camille A. - Marie-Laure - Charlotte - Amandine - Michel - Vincent - Catherine H. - Lucile - Guillaume A. - Ugo - Evelline - Julie - Anne - Thibault - Anaïs - Caroline - Mathilde DC - Nathalie - Amélie - Clara - Pape Brigitte - Loïc P. - Virginie - Max - François - Jenna ET L'ENTREPRISE THÉORÈME
Écriture, réalisation et montage
Fanny de Font-Réaulx & Anna N'Diaye
intervenants
Nathalie Piquée, Sage femme et Gestalt therapeute
design sonore
Raphaël Aucler et Victor Belin / Studio Arigato
MUSIQUE ORIGINALE
Arigato Massaï
SCRIPT
Tifène Pourageaux
la production
Qui a contribué à ce podcast?
EXTRAITS DE L'ÉPISODE
Je pense que dès cet instant-là me tombe sur moi le poids de dire « en fait cet enfant je vais devoir m’en occuper, c’est ma responsabilité, c’est une responsabilité pour toute ma vie, c’est pas une responsabilité que je peux donner à quelqu’un d’autre, c’est moi sa mère, ça, ça ne va jamais changer ».
Le fait de me retrouver seule avec ma fille chez moi ça va être en fait l’angoisse toute la journée. Et je vais me mettre à pleurer beaucoup.
Je n’arrive plus à dormir, je suis en permanence sur le qui-vive, même quand c’est mon mari qui s’occupe de ma fille.
Et là je me dis : « ce n’est pas un baby blues. C’est plus que ça sinon je commencerai a voir des signes que ca va mieux et la j’en ai pas , des signes que ca va mieux.
Pour moi, c’est comme si j’étais dans des sables mouvants, et que les sables mouvants m’aspirent vers le bas et je ne peux pas en sortir.
En fait j’arrive à un stade où je n’ai plus que des moments sombres et je n’ai plus de moments où je vais bien. Et j’ai vraiment des idées hyper morbides qui me passent par la tête, et ça ce n’est pas moi, je n’ai jamais eu des idées comme ça.
Et je sais que si je ne peux pas lui donner cet amour, elle ne pourra pas bien grandir, ce n’est pas possible, on ne peut pas grandir sans amour.
J’arrive au sentiment du « j’en peux plus de vivre »… J’y arrive parce qu’aucune solution marche.
Je sens que j’ai besoin qu’on m’accompagne, je sens aussi que je vais avoir besoin d’un accompagnement externe à mes proches, mais je ne le ressens pas comme une maladie.
Je me souviens avoir beaucoup pleuré, que ça a été difficile parce que je pleurais tellement que c’était difficile à raconter, mais qu’en tout cas je lui ai tout raconté, comment je me sentais, que j’étais au bout du scotch et que j’avais besoin d’aide quoi.
ll va falloir en quelque sorte qu’on fasse baisser la fièvre. Donc pour ça on va utiliser des anxiolytiques, donc du Xanax, et on va mettre en place un anti-dépresseur, du Séroplex, qui lui va mettre plus de temps à faire effet, qui va mettre au moins 15 jours à faire effet.
Le fait d’associer thérapie et médicaments ça m’a beaucoup aidé. C’était vraiment important pour moi qu’il y ait les deux. Ça m’a énormément aidé, je ne m’en serais jamais sorti sans ça, vraiment je n’ai aucun doute sur le fait que c’était indispensable dans mon cas.
J’avais peur de ne plus être séduisante auprès de mon mari. De détruire auprès de lui l’image que j’avais construite, qui était l’image d’une fille hyper dynamique, hyper forte, hyper engagée dans ce qu’elle vit, toujours à la fête… toujours hyper enthousiaste.
J’ai ma petite météo interne. Il va commencer à y avoir du soleil certains jours. Il va y avoir du gris et de l’orage on va dire quasiment toute la journée mais chaque jour, comme à la météo, il va y avoir, un petit peu plus d’ensoleillement.
Du coup, tous ces moments d’ensoleillement il faut savoir que c’est des moments où je vais réussir à me connecter avec ma fille, parce que les moments où je suis dans le noir, je suis incapable de ressentir quelque chose pour ma fille.
J’ai cette culpabilité qui est énorme et en fait je vais le dire à ma fille, je vais lui en parler et je vais lui dire grossomodo « ben écoute c’est pas ta faute, c’est absolument pas ta faute, en vrai je suis hyper contente que tu sois là, vraiment je t’ai désiré et on t’a désiré avec papa et je suis vraiment hyper heureuse de t’avoir et vraiment je n’ai aucun doute là-dessus, simplement pour l’instant je suis fatiguée, je suis triste, je suis malade en fait, et du coup je ne peux pas t’accompagner comme je voudrais, je ne peux pas te donner tout l’amour que je voudrais mais vraiment sache que ce n’est pas ta faute et vraiment sache que je vais me battre et qu’on va y arriver.
Je suis dégoutée parce qu’on est en train de me voler ces premiers moments avec mon enfant, qui sont des moments hyper fédérateurs, qui sont des moments hyper chouettes.
J’ai l’impression d’être devenue maman au fur et à mesure, je pense qu’il y a une chose qui était hyper importante pour moi c’était de ne jamais avoir lâché la barre.
Un truc qui aide vraiment à nouer du lien avec ton enfant, à te sentir maman, c’est le peau à peau. Ce contact physique, même si on est en train de pleurer, même si on est au bout de sa vie, et ben ce moment qu’on vit avec son bébé, moi c’était quand même des moments, où ben je caressais mon enfant, on était vraiment l’un contre l’autre, en mode cocon et tout.
Il y a quelque chose d’abord qui s’éteint en soi. C’est ce qu’on appelle nous, un gel des affects. Du coup je m’occupe de mon bébé, trop ou pas assez ? Je ne sais pas où est le fil conducteur, mon émotion est gelée, je n’ai pas de boussole.
C’est-à-dire que cette femme elle est en train de s’écrouler, elle ne va plus trouver ses mots. Donc elle va dire « il y a un truc » « je ne sais pas » « c’est bizarre je ne peux pas vous dire » elle n’arrive pas à nous raconter l’endroit où elle est parce qu’elle ne le connaît pas.
Et puis Une chose qu’on peut remarquer aussi c’est qu’il n’y a pas d’interaction dans le regard, ou alors il y a une interaction avec le bébé mais ça ne remplit pas, ça donne plutôt de la souffrance.
C’est vraiment quelque chose qui est de l’ordre presque de la sidération, le monde n’a plus de couleur. Je ne sens rien. Ça va durer quelques temps et à un moment donné le voile se déchire et c’est le néant qui gagne et là c’est le gouffre. C’est tomber dans un puits sans fond.
Quand on parle de suicide, on n’est plus dans la dépression du post partum, on est dans la psychose du post partum : il y a d’abord la peur, la terreur, la solitude, l’anéantissement, « je n’appartiens même plus à cette Terre ».
La dépression du post-partum est un gouffre où on a perdu son humanité. L’idée c’est de trouver un thérapeute qui retrouve le chemin de l’humanité. Il est là le soin. Il n’est pas seul avec un traitement, c’est l’interaction qui fait soin. C’est vraiment prendre soin de la mère, prendre soin du bébé. Raconter la mère au bébé, raconter le bébé à la mère, l’un devant l’autre, avec quelqu’un au milieu qui est profondément ancré, et qui dit « je suis là, vous pouvez sortir du néant, moi je tiens debout »
Pour sortir de la culpabilité c’est vraiment prendre la responsabilité du voyage qu’on a fait. C’est parler à son tout petit en disant « tu vois quand tu es né, il y a un endroit où je me suis perdue. C’était un endroit, c’était une forêt, c’était… Et tu appelais et tu appelais « maman, maman » et moi je n’arrivais pas à te trouver ! et on a cheminé pendant un moment et à un moment donné il y a une clairière,
et on s’est retrouvé ! et là on a fait une fête ! »
On est des survivants, on est des gagnants, on est des puissants parce que c’était pas gagné d’avance de sortir de là. Cette femme elle peut être fière d’elle et fière de ce bébé pour qu’ils aient réussi tous les deux à survivre à ce tsunami.
Toutes ces femmes sont des survivantes. Une femme en dépression elle fait ce qu’elle peut. Et ce qu’elle fait c’est bien. Je crois que ça c’est important, qu’elle se le dise à elle-même et que ce soit relayé par l’entourage.
NOS LIVES SUR LA DÉPRESSION POST PARTUM
QU'EST CE QUE LA DÉPRESSION POST-PARTUM?
DÉCOUVREZ L’INTERVIEW D’ÉLISE MARCENDE, PRÉSIDENTE DE L’ASSOCIATION MAMAN BLUES
LETTRE À MON FILS
DÉCOUVREZ LA LETTRE D’ILLANA WEIZMAN, AUTRICE DU LIVRE « CECI EST NOTRE POST-PARTUM », À SON FILS, 3 ANS APRÈS SA DÉPRESSION POST-PARTUM.
LA COUVERTURE SOCIALE RELATIVE À LA DÉPRESSION POST-PARTUM
DANS CET ARTICLE TRÈS COMPLET, NOTRE PARTENAIRE THÉORÈME NOUS APPORTE UN ÉCLAIRAGE SUR LE SUJET.